L’architecte de la chapelle

ANTOINE HENRI REVOIL : LE SEMEUR D’EGLISES

Me voici donc invité à évoquer l’architecte qui a conçu cette chapelle. Cette intervention qui peut être approfondissement de connaissances pour certains, découverte pour d’autres ; n’est sujette qu’à une seule ambition : vous rapprocher un instant du concepteur de ce Saint Lieu, où vous aimez venir prier.
Point de biographie, juste une simple présentation brossée à grands traits que nous avons intitulée : Antoine Henri Révoil, le semeur d’églises.

Avouons dès à présent que ce qualificatif aux résonances poétiques ne sort pas de notre imagination. Il est né sous la plume de Mr Henri Roujon secrétaire perpétuel de l’Académie des Beaux Arts, qui le 12 novembre 1906 fit le discours de cérémonie pour le Mémorial Henri Révoil, érigé à Nîmes, dans un des massifs du Jardin de la Fontaine.

Si vous allez vous y promener ne le cherchez pas. Le buste de bronze, comme tant d’autres œuvres coulées dans le même métal, disparaît sous l’occupation. Réquisitionné par les Allemands, il fut déposé le 5 février 1942 pour être expédié vers une usine d’armement.

Malgré les nombreux monuments de la ville dont il mena la restauration : la Cathédrale, la Tour Magne, le Temple de Diane, la Maison Carrée, l’Amphithéâtre…la cité gardoise ne garde de Révoil, dans un quartier excentré, celui des Collines, qu’une plaque d’arrêt de bus en plastique ; dérisoire !
Et deux plaques de rues émaillées, l’une attaquée par la rouille, l’autre cernée par le lierre, pathétique !
Qu’à ce propos, les Frères nous permettent de citer l’Ecclesiaste : « Vanités des Vanités, tout n’est que Vanités ».

Peut être est-il temps de situer notre personnage :

19 juin 1822, Antoine Henri Révoil voit le jour sous le grand ciel d’Aix en Provence, ville aux multiples fontaines et aux solides traditions, que ses parents habitent au n°9 rue de Masane. Enfant d’une famille bourgeoise, le nouveau né est un cadet. Un frère : Benedict Henri l’a précédé d’une sizaine.
Leur père, Pierre Henri Révoil, qui a épousé une jeune et lointaine cousine : Joséphine Henriette Révoil, est professeur de peinture. Il deviendra le Directeur de l’Ecole des Beaux Arts de Lyon ainsi que peintre officiel, choisi par Madame, son Altesse Royale.

Cet ancien élève de David, abandonnera les sujets antiques pour se tourner vers le Moyen Age. S’en suivra dès lors une série de scènes historiques. Il nous est donné d’admirer quelques unes d’entre elles au Musée du Luxembourg : L’Anneau de Charles Quint – La Convalescence de Bayard – ou encore Marie Stuart allant à la Mort. Imagier du monde de la chevalerie, il inculque cet amour du Moyen Age au futur architecte.

Ce dernier entre dans sa vingtième année lorsque son père décède en 1842. La même année, son frère Bénédict s’expatrie aux USA. De cette double défection, le jeune homme, d’un tempérament sensible, en demeurera marqué à vie.

En 1849, il épouse Louise Henriette Baragnon, issue d’une vieille famille Nîmoise. Son père Jean Amédée Baragnon est avocat avoué près de la cour royale de Nîmes.
De cette union trois enfants vont naître.
Les deux garçons embrassent la vie politique et les Grands Corps d’Etat. Georges, son fils ainé, fut consul au Brésil, la mort le trouve en 1894 au cours d’une mission. Le fils cadet, Paul, Gouverneur de l’Algérie et Ambassadeur à Bernes ; mènera les négociations d’Algésiras, au nom de la France.
Quant à sa fille Jeanne-Marie-Henriette, elle épousera le 20 janvier 1880, Henri Morel, architecte de 25 ans. Ce dernier deviendra petit à petit le collaborateur le plus proche de Révoil. N’accolera t’il pas le nom de son beau-père à son propre nom en signant parfois Morel-Révoil ? Sa plaque funéraire, vissée sur le tombeau de la famille Révoil en atteste, dans le cimetière de Mouriès.
Anaïs l’épouse de notre architecte, décède en 1871, à l’âge de 42 ans, après de longs mois de maladie.
Antoine Henri Révoil s’éteindra le 13 décembre 1900, à huit heure du matin, à l’âge de 78 ans : [dans son habitation sise en cette commune au château de Servanes ]. Comme nous le précise le Registre des décès de la commune de Mouriès, en son 36ème et ultime acte de l’année 1900.

QUI ETAIT HENRI REVOIL ?

Nous allons tenter de l’approcher sans illusion, sans la prétention de poser notre main sur son épaule.
Physiquement, M. La Haie, Président de la Société des Amis des Arts à Nîmes, le décrit ainsi : [de carrure puissante, il avait un visage expressif et altier]. Ajoutant [Il avait le don de grouper, d’animer et de mettre en mouvement les bonnes volontés, les plus prudents, les plus circonspects].
Décrit comme un esprit batailleur, un être tout d’une pièce, sans finasserie, à la franchise « impétueuse », l’homme ne mâche pas ses mots, quitte plus tard à minimiser la portée.
Mr La Haie dira qu’il était [touchant dans la cordialité paternelle qu’il mettait à panser une blessure involontaire].
Sa carrure puissante ne le met pas pour autant à l’abri des ennuis de santé. Très tôt il souffre de rhumatismes. C’est là un genre d’affection douloureusement fidèle, certains parmi vous ne me contrediront pas.
Ses lettres décrivent cet état. En 1854, il délaisse quelque peu ses rhumatismes lorsqu’il répond à un maître d’ouvrages :
[La lettre que m’écrit Mr Arribat…me trouve au lit, une violente esquinancie m’y retient depuis mon voyage à Montpellier].
En 1876, il écrit son découragement à Frédéric Mistral, alors qu’il devait se rendre de Nîmes à Paris :
[Une crise rhumatismale m’a obligé à rebrousser chemin et je suis revenu de Montélimar chez moi].
Plus tard encore, regrettant de ne pouvoir assister au triomphe de son ami à l’Académie de Marseille, il dit :
[…je n’ai pas de chance, depuis Noël, Cathare, douleurs rhumatismales, nerveuses dans la tête !…].
Que l’homme artiste soit sensible, assurément ! Susceptible, à n’en pas douter ! Et regimbe pour un oui ou pour un non, si on touche à la moindre de ses prérogatives.

Ce bûcheron du travail dont tout le monde reconnaît l’allant, possède des moments de faiblesse où l’abattement le saisit. Dès lors il se retranche en son château de Servanes, bien que le lieu lui-même soit parfois source de tracas ; comme en 1886 où il se plaint du mauvais sort qui s’est abattu sur la propriété [voyant jetés à terre et se pourrir des corbeilles et des sacs d’olives et mourir mon pauvre troupeau de mouton atteint de clavelée. Triste sort du propriétaire de Provence, cette année !].

Face aux douleurs morales, l’homme préconise le travail :
[Je sais hélas ! Par expérience ce qu’est le chagrin ici bas : pour moi la mesure a été comble et a débordé…de toutes les consolations, une seule a été assez puissante pour calmer les blessures…c’est l’étude. Cette compagne fidèle qui vous isole de la terre…].

Quoique ayant deux fils dans la carrière politique, Révoil ne laisse pas ses convictions faire barrage à l’amitié. Témoin ce passage de lettre adressée à Mistral :
[Vous savez qu’il est interdit à la politique de nous séparer jamais ; nous avons l’un pour l’autre trop d’estime, trop de sympathie pour craindre d’être jamais blessés par pareille usure même de la main de proches ou d’amis…].

La fidélité semble être un de ses traits de caractère. Treize ans après son départ son épouse Anaïs est toujours présente à son esprit. Parlant de construire son tombeau familial, il écrit :
[…il faut envisager avec calme cette dernière demeure où on rejoint ceux qui vous ont aimé. Moi aussi je vais faire la mienne où m’attendra cette femme d’élite, cette épouse si tendre, cette mère si dévouée que vous avez connue et bien appréciée…].

C’est une fidélité qui s’applique autant envers les membres de la profession qu’envers ses amis. Avec ses derniers, il peut user d’un verbe tendre, voire romantique, comme à propos du décès des parents de Mistral où il lui écrit :
[Vous savez que dans cette grande solitude de Servanes habite un vieil ami qui vous aime et vous admire avec un cœur de vingt ans].

L’homme qui aime se couper du monde et se refaire une santé dans la solitude de Servanes est un écologiste avant la lettre. Ne prend il pas la décision de faire protéger le Val d’Enfer ?
Le Val d’Enfer pour ceux qui ne le connaissent pas est situé au cœur des Alpilles, au pied du village des Baux de Provence. Une végétation typique, dispute le terrain à de grands rochers qui se dressent à la verticale en des formes que le mistral omniprésent, la pluie, la froidure hivernale et le feu des étés assaillent et petit à petit sculptent et transforment.

L’architecte écrit à son ami Frédéric :
[Je compte bien surveiller les Vandales, faire clapper le Val d’Enfer…étudier les mesures à prendre pour faire rentrer dans la légalité tous ceux qui se prétendent chez eux].

Comme nous le voyons, l’homme porte déjà en lui le souci des espaces naturels.

Notre intention n’étant pas d’en faire une icône, nous devons vous livrer impartialement les fruits de nos recherches.
Au nombre de ses détracteurs citons le Père d’Alzon. Le religieux côtoie amicalement Révoil quelques années. Il est le directeur spirituel de l’épouse de l’architecte. Il écrit sur elle ; à Mme Emilie de Pélissier, une amie :
[C’est une nature d’élite, et je veux l’aider, autant que possible, à s’élever vers Dieu…Priez pour elle, elle le mérite].
Et dans une autre lettre :
[Oui Mme Révoil fait de bien bons progrès… je compte sur vous pour la pousser au Tiers-Ordre].
Le Père d’Alzon semble assez proche de la famille Baragnon ; la belle famille de l’architecte. Dans un premier temps il est dévoué à l’architecte lui confiant la construction du couvent et du pensionnat de Nîmes. Il le présente au docteur Privat, pour la construction de la chapelle néo-romane de l’Hôpital à Lamalou-les-Bains.
S’il reconnaît les qualités de l’architecte, peu à peu son jugement porté sur les actions et les pensées de l’homme s’avère de plus en plus sévère.

Répondant sans doute à une inquiétude émise par la révérende Mère Marie-Eugènie de Jésus, quant à la construction du pensionnat ; il écrit le 2 avril 1859 :
[Révoil est, en effet, et normand et gascon. Je vais le surveiller].

Quelques années plus tard il écrit à la comtesse d’Escures :
[Si vous voulez l’histoire de Révoil, elle se résume ainsi : un ambitieux courant à sa ruine et y entraînant sa famille, assez faible pour se faire entraîner].

A Eugène Germer-Durand, architecte Nîmois qui lui fait savoir qu’on vient de lui octroyer la légion d’honneur. [Si Révoil y est pour quelque chose, il aura assez le soin de vous le dire pour que je n’aie pas à insister sur le degré de reconnaissance dont vous êtes son débiteur].
A l’épouse de ce même architecte il dira :
[Ce qui a fait la position de Révoil, c’est sa femme. Il ne suffit pas d’avoir du talent, il faut le faire valoir].
Tant de réflexions nous porte à penser charitablement que la persévérance chez le Père d’Alzon, était une de ses qualités premières.

Révoil ne sera pas privé d’honneur durant sa vie. Chevalier de la légion d’honneur en 1865, il en devient officier en 1878, et commandeur en 1900. Ce dernier grade, ce sera son fils Paul qui le lui remettra sur son lit de souffrances quelques jours avant son décès.
Entre-temps il est fait chevalier de l’Ordre de St Grégoire le Grand par le pape…..en 1870, et accède en 1878 à l’Institut de France comme membre correspondant de l’Académie des Beaux-Arts.
En 1890, à la suite d’une inspection portant sur la vérification des travaux effectués sur les Monuments Historiques de Roumanie, le Roi lui offre le Cordon de Commandeur de son Etoile.
L’homme quittera ce monde chargé d’honneurs. Etre complexe, semblable à nous tous oserai-je dire, tiraillé entre sa foi et cette forte adhésion au monde qui pour lui semble se traduire par cette soif inextinguible de reconnaissance.

C’est dans l’atelier de Caristie que le jeune Antoine Henri Révoil, étudie les éléments d’architecture. Caristie, qui est un ami de son père, le présente en 1845 à l’Ecole Royale des Beaux Arts, section Architecture, où il est admis en seconde année.
Durant son passage il va obtenir quelques médailles en différentes matières : bois, fers, maçonnerie, construction générale, ainsi que des mentions en architecture et en perspective.
Parallèlement, il continuera de fréquenter l’atelier de Caristie où son amour du Moyen-Age et de l’art Roman va se fortifier.

L’importance de l’époque et du lieu ne peut être niée. Les deux ne se révèlent ils pas comme des facteurs, sinon déterminants, du moins importants dans la vie d’un homme ?

En premier chef intéressons nous à l’époque.
Lorsque Antoine Henri Révoil entre à l’Ecole Royale des Beaux Arts de Paris, en 1845, le monde savant vient de se réveiller d’un long sommeil. Après des décennies d’indifférence coupable, la prise de conscience de quelques responsables attire les regards sur les grands témoins de pierre malmenés par le temps et les hommes.
Antoine Henri Révoil, grandit dans une époque, où la critique de l’opinion architecturale et archéologique tend à s’affirmer. Des voix s’élèvent contre la façon en cours de procéder, qui consiste à restaurer sans tenir compte de l’architecture existante.
C’est une vraie révolution que la naissance de cette opinion archéologique qui lors du courant initial va s’appliquer aux grands édifices (nous pensons aux cathédrales), et s’investit par la suite sur les édifices plus modestes.
Cette opinion prend racine et se développe dans les Sociétés savantes qui éclosent sous la Monarchie de Juillet.

Dès 1835, une structure officielle voit le jour : le « Comité des Arts et des Monuments », qui publiera le « Bulletin Archéologique », en 1840, bulletin qui sera accompagné en 1844 des « Annales Archéologiques » où la rubrique « Conservation des Monuments », fait part des travaux menés sur les grands édifices et les analysent en distribuant blâmes et satisfecit.

Dans la première moitié du 19ème siècle, la restauration des cathédrales relève de l’autorité des Conseils des Bâtiments Civils et de l’Administration des Cultes. La réorganisation administrative que Durieu, le nouveau Directeur des Cultes, va conduire à partir de l’année 1848, année qui coïncide avec la fin des études de Révoil, va vers plus de centralisation, plus de professionnalisme.
Jusque là le Préfet nommait l’architecte qui oeuvrait sur les Bâtiments Publics, que ceux-ci soient civils ou religieux.
La réforme Durieu, annoncée dans son rapport du 12 décembre 1848, tient dans la création d’un corps particulier : Les Architectes Diocésains, renforcés plus tard par le Corps des Inspecteurs Diocésains.
Ratifiée le 16 décembre 1848 par le Président de la République, cette réforme confie les édifices religieux à ce nouveau corps d’architectes. Nommés par le ministre, leur circonscription territoriale peut s’étendre sur plusieurs diocèses. Etant de durée indéterminée, cette nomination correspond à un C.D.I. avant la lettre. Révoil, lui-même, n’écrira t-il pas à son ami Mistral, le 1er février 1898 :
[Je suis de travail : j’organise mon service barbare d’architectes bâtisseurs de monuments historiques dans mes départements !…Mais grâce à Dieu j’ai ma main, mes yeux et ma tête de 50 ans et j’en aurai bientôt 76].

Loin de ces années là, le jeune Antoine Henri Révoil arrive au moment opportun, sur ce que nous appellerions de nos jours, le marché du travail. Ce point précis du temps qui voit la création de ce nouveau corps d’architecte offrant à la fois un cadre et une ouverture.
Chargés de missions publiques, fonctionnaires de l’Etat, les membres de ce nouveau corps administratif, n’en sont pas moins libres d’exercer parallèlement leurs talents sur des œuvres privées. Révoil en réalisera quelques-unes : le tombeau de Monseigneur Cart à Nîmes, l’Hôtel de Ville de St Gilles, des écoles, des maisons particulières….cependant il se vouera presque entièrement à l’art religieux.

Profondément croyant, il se laisse captiver par ces hautes demeures divines. Nous n’avons pas devant nous, un créateur au sens poussé du terme ; Révoil est un architecte-archéologue qui poursuit le passé et le restitue. Aucun bouleversement architectural ne signe ses œuvres personnelles, tout au plus quelques apports délicats que son tempérament d’artiste réclame.

Le décret du 7 ami 1853, et l’arrêté du 20 mai viennent ménager les susceptibilités locales en incluant dans le choix de l’architecte la consultation préalable de l’Evêque et du Préfet.
Après le facteur temps, voici le facteur lieu qui entre en scène.
Quelques années auparavant, en 1848, Antoine Henri Révoil retourne chez lui avec son diplôme d’architecte. L’année suivante, il s’installe à Nîmes, berceau et bastion, pourrions-nous dire, de sa belle-famille ; cette dernière y possède une forte influence.
Les amis de son père, qu’il s’agisse de Caristie ou du Baron Ferdinand de Guillermy, continuent de le soutenir en ce début de carrière.
Fort de ces appuis, de ses qualités propres, et de son goût prononcé pour les monuments historiques, il s’occupe des nombreux monuments qui parsèment les villes d’Orange, Nîmes, Arles….

En 1852, le temps et le lieu vont se trouver liés plus que jamais car Auguste Lejeune, architecte diocésain de Montpellier et de Fréjus, décède. Révoil pose aussitôt sa candidature appuyée une fois de plus par Caristie et De Guillermy, dont la recommandation qui suit, adressée au Ministre, est citée par tous les Historiens d’Art qui se sont penchés sur la carrière de notre architecte :
[…Permettez-moi de recommander à votre bienveillance un jeune et habile architecte appartenant à une famille à laquelle je suis intimement lié. Il s’agit de M. Henri Révoil qui vous a déjà été présenté comme candidat à une place d’architecte diocésain…].

A cet instant de notre intervention nous croyons bon de préciser que l’obtention d’un poste d’architecte diocésain, passe par un rapport de force qui s’établit en amont de la décision finale. Des renseignements et des volontés parfois contradictoires n’aident en rien cette décision. L’appartenance ou de simples affinités politiques jouant également un rôle.
Quoiqu’il en soit, c’est bien Antoine Henri Révoil qui en 1852 obtient le poste d’architecte diocésain de Montpellier et Fréjus. Peu de temps après, Mgr Thibault, alors évêque de Montpellier, le prend comme architecte de la cathédrale.

A trente ans, Révoil est Architecte en chef des Monuments Historiques, Architecte Diocésain, et Architecte de la Cathédrale de Montpellier. Il ne cesse de conforter sa présence au sein du Corps des Architectes Diocésains. En 1853, Léon Vaudoyer, Inspecteur général des édifices diocésains, livrant son compte rendu du personnel, écrit : […il y’a tout lieu de croire que l’administration des Cultes n’aura qu’a se féliciter du choix qu’elle a fait de M. Révoil qui est actif, instruit, et rempli de zèle].
Durant son demi siècle de carrière il deviendra tour à tour architecte des cathédrales de Montpellier, de Fréjus, d’Aix, de Nîmes, de Marseille, d’Alger, et de Lyon.
Henri Roujon dira lors de l’inauguration du monument dédié à la mémoire de l’architecte.
[L’œuvre personnelle, l’œuvre moderne d’Henri Révoil, délicatement originale, encore qu’imprégnée de tradition est représentée par plus de 70 églises ou chapelles…dessinateur prestigieux, rompu à toutes les techniques, initié à tous les arts, Révoil allait d’un carton de mosaïque au schéma d’un ciboire avec l’aisance et la maîtrise des artistes d’autrefois].

Malgré tous ces chantiers et les responsabilités qui en découlent, l’archéologue continue de cohabiter avec l’architecte. Mettant à profit ses nombreux voyages, Révoil mesure, dessine, décrit de nombreux monuments du Midi de la France. Ce travail remarquable sera mis en forme sous le titre : L’Architecture Romane dans le Midi de la France, éditée par Morel Cie en 1873.
C’est une œuvre de référence qui s’étale sur trois tomes et recèle plus de deux cents planches : élévations, coupes, détails architecturaux, peintures murales…
(Si certains parmi vous sont intéressés, la médiathèque d’Arles en possède un exemplaire).
Dessinateur hors pair, les artisans et les artistes qui travaillent sur ses chantiers, le font bien souvent d’après ses cartons. Vous avez un exemple, avec le dessin du fer forgé de la grille qui borde la cathédrale St Pierre.
Ses dessins explorent le mobilier : stalles, cathèdres, chaires, buffets d’orgues…ainsi que vitraux, mosaïques et objets cultuels : ciboire, calices, ostensoirs, burettes…

Présent sur tous les fronts, il mettra au point le téléiconographe qui dépassera en précisons le rendu de la chambre claire qui est utilisé à l’époque.

Jusque dans ses derniers jours, il mettra la main à l’écriture de son livre : Maîtres es pierres de la vallée du Rhône au IXème siècle, il en fait part dans une lettre à Frédéric Mistral, datée du 1er février 1898, deux ans avant sa mort.

Si Révoil avait une attirance particulière pour l’art roman, le gothique ne le rebutait pas, nombre de ses réalisations en attestent, y compris cette chapelle qui nous accueille en cet instant de partage.

Inspirée par l’esprit du gothique français du 13ème siècle elle possède un vaisseau unique de trois travées barlongues (probablement rectangulaires). Un transept aère le chœur de plan carré qu’une abside a cinq pans prolonge et enrichit par sa géométrie.
Les vitraux sous leurs arcs brisés sont vierges de remplages si ce n’est la rose polylobée de la façade. L’intérieur d’une sobriété peu coutumière accueille uniquement quelques feuillages et crochets qui sculptent les chapiteaux, et repousse le décor en façade.
Un portail saillant à ressaut, un gable symétriquement flanqué de deux niches à colonnettes dégagés et surmontées de dais.
Sous les sculptures des rampants qui reprennent les motifs du feuillage et du crochet, un arc brisé accueille la rose.
Le lobe que nous retrouvons sur les différents éléments architecturaux, unifie, l’ensemble. A contre ciel, juchée sur l’acrotère axial, la vierge couronnée raisonne l’élan architectural.

Sur Montpellier, les grands travaux de Révoil sont la Cathédrale Saint-Pierre et le Petit Séminaire que certains d’entre vous connaissent sous le nom de la caserne de Lauwe ou encore l’E.N.S.A.M.
Sa chapelle romane que nous avons étudiée pour notre maîtrise ; désacralisée, compartimentée, défigurée, n’est même plus le lointain souvenir de ce qu’elle fut. Seule, la façade extérieure tente de témoigner encore.

Arrêtons nous un instant sur les dates de ses différents postes ; ceci nous aidera à mieux le suivre.
En 1874, il devient architecte de la cathédrale de Marseille. L’année suivante il demandera à être relevé du diocèse de Fréjus. En 1879, il se fera relever du diocèse d’Aix et en 1881 sera remplacé par Thomas Duprés sur le diocèse de Montpellier.
Révoil est âgé de 59 ans. L’année suivante en 1882, il est chargé des édifices diocésains d’Alger. Rappelons-nous que son fils Paul est le Gouverneur de l’Algérie.
En 1884, il sollicite et obtient le poste d’architecte diocésain de Lyon. Cinq ans plus tard en 1889, il est chargé de l’ensemble des édifices diocésain de Marseille.
Jusque dans ses dernières années, le bâtisseur poursuivra son œuvre, secondé de plus en plus par ses inspecteurs et surtout par Henri Morel, son gendre.
En 1900, à l’âge de 78 ans, il prend le chemin de ce tombeau roman dont il a lui-même dressé les plans. De nos jours, le tombeau est toujours là, dans le cimetière de Mouriès ; malmené par les intempéries et le coup de gomme de la vie qui passe.
A un jet de pierre de là, dans la garrigue boisée, la chère solitude de l’architecte s’en est allée, et Servanes, son château, offre désormais greens et cocktails aux golfeurs de la Haute Société.

Soyez remerciés pour cette attention amicale que vous avez bien voulu m’accorder.

Dominique.

 

Huic Arabia est conserta, ex alio latere Nabataeis contigua; opima varietate conmerciorum castrisque oppleta validis et castellis, quae ad repellendos gentium vicinarum excursus sollicitudo pervigil veterum per oportunos saltus erexit et cautos. haec quoque civitates habet inter oppida quaedam ingentes Bostram et Gerasam atque Philadelphiam murorum firmitate cautissimas. hanc provinciae inposito nomine rectoreque adtributo obtemperare legibus nostris Traianus conpulit imperator incolarum tumore saepe contunso cum glorioso marte Mediam urgeret et Parthos.